De la French Connection, l’on a retenu cette vague d’exportation massive de drogue au départ de Marseille à destination des Etats-Unis dans les années 70. Désormais, nous en retiendrons aussi le souvenir de haute envergure que Cédric Jimenez en a fait avec ce film, La French, racontant la célèbre confrontation entre le juge Pierre Michel et Gaëtan Zampa, polar aussi vibrant dans son interprétation qu’ingénieux dans sa mise en scène…
La caméra tremble, les clopes flambent, les mafieux suintent la came jusque dans leurs respirations, les flingues crachent du sang, le soleil marseillais cogne, et Jimenez filme dans l’ombre des bas quartiers la corruption ambiante et les fusillades verbales entre flics et voyous. Puis se paye le culot d’y foutre du second degré avec une adresse peu commune. Ajoutons à cela une restitution authentique du contexte de l’époque : la réalité embrasse désormais la fiction, c’est violent, mais c’est beau.
Une attention toute particulière a été portée à la relation presque complémentaire entre le Juge Michel et Gaëtan Zampa. Opposés dans leurs actions, les deux hommes affichent pourtant les mêmes émotions, le même tourment intérieur, et semblent construire à eux deux un seul et même personnage : Quand l’un inspire, l’autre expire. Quand l’un est heureux, l’autre pleure. Quand l’un tire, l’autre est touché. Une mise en scène dialogique particulièrement soignée, d’où l’impact de cette seule et unique scène de confrontation en face-à-face sur la falaise entre les deux hommes.
Le casting est phénoménal, dominé de très haut par Jean Dujardin et Gilles Lellouche. En y réfléchissant, personne dans le cinéma français ne pouvait tenir leurs rôles à leur place. Aparté dans cette critique : personne ne peut plus prétendre remplacer ces deux-là dans plus aucun de leurs films tant leurs jeux distincts sont uniques : Dujardin fait du Dujardin, Lellouche fait du Lellouche, sûrement parce qu’ils sont les nouveaux tauliers du cinéma français, fervents successeurs de Belmondo et Ventura, deux grandes gueules ralliant le drame et la comédie d’un seul trait, des mecs qui imposent leur jeu à l’écriture d’un film, plutôt que l’inverse. On appelle ça le talent, les amis.
Des punchlines, des acteurs et une mise en scène digne de ce nom. Avec La French, Cedric Jimenez rejoint désormais Olivier Marchal et Fred Cavayé dans le petit cercle des grands du polar français. De la bonne came à faire pâlir les ricains outre-atlantique. Quand on vous dit que le cinéma est une drogue…
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