Note : Parue au lendemain du terrible incident survenu dans le 14e arrondissement de Marseille, cette critique – comme toutes celles publiées sur ce site – a pour seule vocation de diffuser un avis sur une œuvre et non de commenter l’actualité qu’elle peut évoquer de près ou de loin.
Enfin : c’est un peu le mot que l’on prononce tous les mercredis depuis le 19 mai dernier. Présenté hors-compétition à Cannes, le dernier né de Cédric Jimenez a su se faire attendre autant que Kaamelott et consorts. Et contrairement à d’autres, Bac Nord est belle et bien la bombe attendue.
A la base, tout part de cette affaire dont l’issue avait fait les titres du 20h en 2012 : le démantèlement d’un haut lieu du trafic de stupéfiants par la brigade de terrain des quartiers nord de Marseille, avant que le système judiciaire se retourne brusquement contre eux… Pour Cédric Jimenez, qui avait su démontrer tout son talent pour le polar avec La French, en 2014, l’épisode en question était trop ciné-friendly – c’est Marseille bébé ! – pour ne pas s’en saisir et dénoncer au passage les dérives d’un système toujours plus féroce.
Dans l’attente, on lui prêtait des faux-airs de La Haine et plus récemment, des Misérables. Force est de constater qu’outre la thématique et le théâtre des opérations, il n’en est rien. Dès les premières secondes, Bac Nord impose sa propre identité à la faveur d’une mise en scène fiévreuse, d’une tchatche “grande gueule” et d’un rythme effréné. Jusqu’à cette séquence centrale d’infiltration absolument saisissante qui en accrochera plus d’une à son siège…
En BAC organisée
Comme attendu, le trio de tête – Lellouche, Civil, Leklou – est impérial. Mais la vraie star ici, c’est Marseille, sa bonne mère, son caractère, son ciel d’azur, ses eaux calmes et ses quartiers bouillonnants. Cédric Jimenez, né du documentaire, propose à son spectateur une immersion totale dans les quartiers Nord – dont il est natif – en logeant sa caméra dans tous les recoins possibles. Puis, caméra épaule, vient capter le climat haute tension d’une confrontation à l’entrée d’une cité, quand ce n’est pas pour constater, en gros plan, les visages de flics exténués par une profession qui n’a plus le moindre sens.
Bien plus qu’un film policier : Bac Nord raconte des hommes avant de raconter une histoire. C’est pourquoi les moments de vie de ces 3 mecs étouffés par le système sont aussi bienvenus que les séquences policières. L’occasion pour le réalisateur de débrider ses héros avec quelques vannes assez saillantes et jamais de trop. La bande-son, dans son éclectisme le plus assumé (Jul, Michel Berger, The Animals…), trouve parfaitement sa place dans ce traitement très humain des personnages.
N’en déplaise aux pourfendeurs des Misérables et à Libération, Bac Nord est la fusion idéale entre l’œuvre manifeste et le pop-corn movie. Mais surtout, il confirme l’idée d’une spécificité française : le polar. Pour tout ça, il est bien parti pour s’imposer comme l’un des hits 2021.